| | Extrait du "Zoo" Le Zoo (que dautres appellent Réserve ou ménagerie) se compose dun nombre indéfini, et peut-être infini, de cages rectangulaires comportant sur leur pourtour de vastes fosses bordées de grilles très hautes. De chaque côté de ces cages on aperçoit interminablement les autres cages, toutes peuplées danimaux despèces inférieures et supérieures. La distribution des animaux y est invariable. Vingt singes, oiseaux dépareillés ou zébus dAsie septentrionale couvrent tous les murs, à raison de cinq par côté; leur hauteur qui sapparente à celle de leurs cages ne dépasse guère la taille dune girafe ou dune puce normalement constituées. Chacune de ces cages débouche sur un couloir étroit, lequel débouche à son tour sur une autre cage, identique à la première et à toutes. A droite et à gauche de chaque cage se trouvent deux réduits minuscules. Lun permet à lange gardien de chaque animal de dormir debout; lautre sert à satisfaire les besoins fécaux. A proximité passe un escargot à la coquille en colimaçon, qui sabîme et sélève à perte de vue. Au fond de chaque cage se trouve une glace, qui redouble fidèlement le visage et lapparence des visiteurs du Zoo. Ceux-ci en conclurent que le Zoo nest pas infini. Sil létait réellement, à quoi bon cette duplication illusoire, qui vise à inclure et enfermer les humains eux-mêmes dans létroitesse des cages. Je préfère, pour ma part, rêver que ces surfaces polies sont là pour figurer linfini animal et pour le promettre... Des sortes de globes sphériques appelés lampes assurent léclairage. Au nombre de deux par cage, ces globes émettent une lumière éternellement insuffisante. Cest ainsi quon peut voir les animaux dériver chaque soir dans une bienheureuse inconscience et somnolente obscurité. Retour |